Aborder le vignoble de St Georges d’Orques en évoquant ses antécédents historiques pourrait paraître banal surtout dans une région où la viticulture est implantée depuis le 6 e siècle avant notre ère grâce aux comptoirs phéniciens puis grecs. Or l’histoire de St Georges d’Orques est en ceci singulière, que c’est, avec le muscat de Frontignan – Mireval, le seul cru Languedocien à être toujours cité dans les écrits sur le vignoble français.Deux éléments fondamentaux président à la naissance d’un cru : le terroir et les vignerons. Dans la longue histoire viticole Languedocienne, Saint Georges d’Orques est incontestablement l’appellation dont la notoriété est la plus forte et la plus ancienne.

Ce vin, dont la qualité est unanimement reconnue depuis le Moyen-Age, est exporté dès le début du XVIIe siècle dans toute l’Europe, jusqu’en Russie, véritable exploit commercial pour l’époque. Remarqué en 1787 par Thomas Jefferson, alors ambassadeur des États-Unis, celui-ci une fois devenu Président, en facilite l’importation dans son pays à partir de 1804.Des publications agronomiques de facture moderne font état du type particulier des vins de St Georges d’Orques : l’œnologue et négociant en vin André Jullien, dans sa « Topographie de tous les vignobles connus », publié en 1816, le classe dans sa région vignoble de 1 re classe, et, sur le plan national, le fait figurer dans la même catégorie que St Emilion, Fronsac, Meursault, Mercurey, Givry, Morgon. Il en compare même les vins à ceux de Bourgogne pour leur corps et leur distinction.

L’ampélographie illustrée de Victor Rendu de 1854 consacre une page entière au vignoble de St Georges d’Orques. Dans cette édition, seuls les meilleurs terroirs français et les meilleurs cépages sont détaillés.En 1868, le Dr Jules Guyot, médecin, physicien, et agronome, dans son « étude des vignobles de France » ne cite pour l’Hérault qu’un seul vignoble : les vins rouges « de premier ordre » de St Georges d’Orques.Une telle renommée puise sa source dans son terroir particulier et dans le zèle que les vignerons mettaient à le respecter pour le “faire parler”.

La contrefaçon même de ces vins est un signe supplémentaire de leur notoriété et des revenus qu’ils dégageaient. La notion de « décret » était également présente, puisque des « garde-raisins » étaient payés pour surveiller le bon déroulement des récoltes. On fixait une date pour le ban des vendanges. Enfin on veillait en amont, à la provenance des raisins, et en aval, sur la vente de vins venant bien du terroir par l’apposition de la marque, et la délivrance d’un certificat d’authenticité accompagnant chaque vente !!

DES NOTIONS D’AVANT GARDE

Les acteurs principaux que sont les vignerons, ont depuis toujours eu le plus profond respect pour ce cadeau de la nature. L’idée « d’appellation contrôlée » est en effet apparue dès le début des années 1700 avec la création d’une marque à feu, frappée sur les futailles au moment de la vente, pour certifier l’origine du vin. Contrefaites et modifiées, il y eut au moins trois marques à feu, la dernière connue en 1785.Notre logo est la deuxième marque à feu des « Vins de St George ». Nous l’avons découverte lors d’une séance de recherche aux archives départementales en février 1993. Grande fut notre émotion de tenir entre nos mains cet acte de vente, enfoui et oublié depuis 2 siècles et demi.

L’histoire des terroirs est indissociable de celle des hommes. Lorsque les plaines Languedociennes furent, au milieu du XIXème siècle, transformées par les investisseurs néo-viticulteurs en véritable océan de vignes et qu’un raz-de-marée de vins ordinaires déferla sur toute la France, le marché des vins fins de St Georges d’Orques, malgré son histoire et sa résistance, fut littéralement submergé . Il n’y eu plus de place pour les crus historiques du Languedoc, devenus, en raison de leurs faibles rendements, trop chers et non concurrentiels. L’apparition de nouvelles maladies dévastatrices comme le mildiou, l’oïdium, et enfin le phylloxéra fit mettre aux vignerons plusieurs fois genoux à terre. Quand la technique du greffage fut mise au point, ces hommes financièrement exsangues, n’eurent d’autre choix que de replanter leur vignoble dévasté, avec les cépages nouvellement introduits. Beaucoup plus productifs, et adaptés au marché, ils permirent leur survie, au prix de l’abandon des cépages authentiques.